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Le château fort de Trémazan


( Kersaint, commune de Landunvez )


Inscrit à l'inventaire des Monuments Historiques en 1926.

Visible de loin seulement

Entrée formellement interdite :
propriété privée et danger d'éboulement.





GPS : 48°33'01N  4°42'43 W



   Partant de St-Renan, se diriger vers Argenton par la D68 et, face à la mer, tourner à droite. Continuer vers le nord et 1,5 km plus loin, tourner à gauche et prendre la route touristique. Celle-ci longe sur 5 km le magnifique littoral de Landunvez. Après le grand parking final, suivre toujours cette route bordée de maisons jusqu'à la jolie plage de Trémazan dont l'accès est partiellement obstrué depuis la dernière guerre par un mur anti-chars. Stationner en face, à droite de la route. De là, on aperçoit au loin le donjon du château.
Les ruines sont dans un tel état d'abandon que, par sécurité, leur accès n'est pas autorisé. Mais il est possible de voir de plus près le donjon et le pigeonnier en continuant à pied vers Kersaint et en prenant la première petite route sur la droite.


A proximité immédiate du stationnement, la Communauté de communes
a fait installer une borne explicative illustrée.




   Le grand donjon carré est celui d'un ancien château fort aujourd'hui en ruines. Il était flanqué vers l'est de logis aboutissant à deux tours rondes et ce premier ensemble était bordé d'une profonde douve. Plus loin à l'est se trouvait un ouvrage avancé, une basse-cour de forme carrée entourée de courtines et dotée d'une tour à chacun de ses angles. Ces deux ensembles fortifiés devaient être réunis par une passerelle en bois lancée au-dessus des douves dont la profondeur est impressionnante. L'accès se faisait par un chemin aboutissant à un pont-levis, au nord-ouest, à partir du littoral.


Plan approximatif établi par Alain FERRAND :
«Le château de Trémazan», 1905.
Cet archéologue est l'auteur de fouilles personnelles
effectuées sur le site en 1904.




Plan établi en 2001 par l'association «SOS Château de Trémazan»
qui a réalisé une étude minutieuse des ruines, une maquette
et une série de panneaux exposés à la Maison des Chanoines à Kersaint.

Attention, l'orientation des plans est celle du paysage
vu depuis la borne explicative.


Un emplacement particulier

Alors que l'on est plutôt habitué à voir des châteaux forts perchés sur des hauteurs, il n'en est rien ici. La forteresse a été édifiée dans un vallon marécageux, aujourd'hui coupé de l'océan par une dune sur laquelle passe la route.


Actuel plan d'ensemble extrait de «Le Château fort de Trémazan»
© JYB/ «SOS Château de Trémazan» 2001.
L'étoile rouge indique l'emplacement de la borne explicative.


Mais il suffit d'observer la plage de Trémazan, où la mer se retire très loin à marée basse, pour comprendre qu'à cet endroit le sable de l'anse de Portsall, poussé par le vent et les courants, s'accumule rapidement. On peut donc penser que depuis le début du Moyen Age le paysage s'est considérablement modifié. Situées dans une ria, les douves du château étaient sans doute reliées à la mer lors de leur creusement. L'emplacement du château devait ainsi permettre à ses occupants d'intervenir rapidement en cas de danger venu de l'océan. Et l'on pense évidemment aux auteurs de raids maritimes, mais aussi à la piraterie. La forteresse était pratiquement invisible depuis la mer et du haut de son donjon de 25 m, on pouvait aisément surveiller toute la côte. Le comblement progressif de l'anse de Portsall avec la formation de la dune a dû contribuer à l'abandon du château.

   Un ancien palais ?

   La première mention qui est faite d'un «palais» à Trémazan figure dans la relation d'une légende par le frère Albert le Grand, chroniqueur du XVIIe siècle, dans «Vie des saincts de la Bretaigne armorique» Nantes 1637.
  Cette chronique relate la légende tragique, en l'an 545, de Saint Tanguy, fils du seigneur Golon de Trémazan. On peut en prendre connaissance sur ce site à la page Fontaine Sainte Haude. Les propriétaires du château portant le nom de «Du Chastel» revendiquèrent toujours cette ascendance. Cependant, sur le terrain, aucun élément ne permet actuellement d'affirmer la présence d'une première construction féodale à l'emplacement du château fort.

   Construction et agrandissement du château

  On ignore la date de construction du donjon en pierre qui a pu succéder à une éventuelle tour en bois des premiers siècles du Moyen Age. On sait seulement que le château aurait subi des destructions en 1220, et qu'il fut reconstruit par Bernard du Chastel à son retour de croisade vers 1250. Selon l'archéologue Alain Ferrand, le donjon n'aurait connu en fait que des réparations. Mais des études de La dendrochronologie est une méthode de datation des bois anciens. Elle repose sur l'étude des anneaux concentriques, ou cernes, que l'on distingue sur tout tronc coupé. Ces cernes annuels sont plus ou moins importants, plus ou moins espacés en fonction du climat de chaque année. En établissant des comparaisons avec d'autres cernes de bois bien datés, on parvient à dater de nouveaux bois qui serviront à leur tour à en dater d'autres. dendrochronologie attribuent pourtant à ses poutres une date encore plus récente : la fin du XIVe siècle ! Manifestement nos connaissances sont trop imprécises sur ce château médiéval qui doit surtout à son isolement géographique et à la consolidation récente de ses ruines d'avoir été si longuement conservé.



   Plusieurs travaux de fortifications sans doute échelonnés du XIIIe au XIVe siècle ont suivi la construction du donjon : tout d'abord la première enceinte et les logis adossés à la courtine haute d'une quinzaine de mètres et large de 2,80 m. La défense est assurée par des mâchicoulis construits tout au long du chemin de ronde, par deux grosses tours, hautes de 20 m et larges de 10, ainsi que par le donjon demeuré à l'extérieur. On a creusé les fossés puis bâti au XVe siècle l'énorme basse-cour totalement distincte du premier ouvrage et destinée à héberger la population en cas d'urgence. Des meurtrières sont aménagées pour utiliser des pièces d'artillerie. Cet ensemble impressionnant, aux Les hourds étaient des galeries couvertes faisant le tour du mur d'enceinte en surplombant le pied extérieur des murailles. hourds en bois et aux logis couverts d'ardoises affirmait la puissance du seigneur propriétaire. Ce fut certainement en son temps l'une des plus vastes forteresses de France.


Restitution hypothétique du château du XIVe siècle
par Pierre Audibert, Association «SOS Château de Trémazan» © 1995


De puissants seigneurs, d'éternels gardiens du roi :

  Maîtres d'un territoire comprenant tout le Bas-Léon jusqu'à Brest, les Du Chastel ont été en effet jusqu'au XVIIIe siècle l'une des plus grandes et des plus puissantes lignées seigneuriales de Bretagne. Plusieurs d'entre eux se distinguèrent au service du roi de France.
  Guillaume II du Chastel, vainqueur devant Saint-Mathieu d'une flotte anglaise en 1403, fut chambellan du roi Charles VI.
  Son frère Tanguy III du Chastel, vaillant militaire et prévôt de Paris, sauva le dauphin, futur Charles VII, alors âgé de 10 ans, lors de la révolte des Cabochiens en 1413.

tableau de Tanguy III
Auguste Couder, 1828 : Tanguy III du Chastel sauvant le dauphin.
© Musée des Beaux-Arts, Rennes



On sait aussi qu'en tant qu'un des chefs du parti des Armagnacs, il prit part à l'assassinat du duc de Bourgogne Jean-sans-Peur lors de l'entrevue de Montereau en 1419. Dix ans plus tard, à Chinon, ce fut sur ses conseils que le dauphin accepta de recevoir Jeanne d'Arc.
  Son neveu Guillaume III du Chastel fut nommé officier de la maison du roi. Vaillant guerrier, comme Bertrand du Guesclin il a bénéficié du privilège d'être enterré au côté des rois de France dans la basilique de Saint-Denis.

St-Denis : tombeau de Guillaume III du Chastel
© Photos Danielle Lambert-Motte
 


  Son épitaphe est la suivante :

« Ci-gît noble homme Guillaume Du Chastel de la Basse Bretagne, pannetier du roi Charles VII et écuyer d'écurie de monseigneur le Dauphin, qui trépassa le 23 de juillet, l'an de grâce 1441, durant le siège de Pontoise en défendant le passage de la rivière d'Oise, le dit jour que le duc d'York la passa pour Le verbe cuider, en vieux français, signifiait : avoir l'intention de, croire, penser, tenir pour vrai. cuider lever le dit siège, et plut au roi pour sa grande vaillance et les services qu'il lui avait faits en maintes manières, et spécialement en la défense de cette ville de Saint-Denis contre le siège des Anglais, qu'il fût enterré céans. Dieu lui fasse merci. Amen.»

  Tanguy IV du Chastel, le frère de Guillaume III, succédant à son oncle Tanguy III, entra à son tour au service de Charles VII dont il prit personnellement à sa charge les frais de funérailles en 1461. Le duc de Bretagne François II, père d'Anne de Bretagne, le nomma Grand Maître de son Hôtel et capitaine de la ville de Nantes. Tanguy IV fut blessé à mort au cours du siège de Bouchain ( Nord ) en voulant protéger le roi Louis XI. Celui-ci le fit inhumer face à son futur tombeau dans la basilique de Cléry Saint-André ( Loiret ) où tous deux gisent aujourd'hui.

tombe de Tanguy IV
Cléry-St-André : Tombe de Tanguy IV.
© Photo YL

  Parmi les générations suivantes des Du Chastel, plusieurs s'illustrèrent encore, mais dans la Marine Royale. « Antiquité de Penhoët, vaillance du Chastel, richesse de Kermavan et chevalerie de Kergounadeac'h » Un dicton rendait hommage à leur bravoure et on les appelait les «rois de Brest». D'autres furent de hauts dignitaires ecclésiastiques.

L'abandon du château :

  Au cours du XVIIe siècle, la vieille forteressene ne correspond plus ni aux besoins de résidence de ses propriétaires, ni à la défense de la région. Elle est tout simplement abandonnée par la famille du Chastel et un siècle plus tard, seul y loge le receveur général chargé de l'administration de la seigneurie. Une ferme occupe le domaine.
Le château ancestral, déjà mal en point, devenu propriété royale, fut vendu comme bien national à la Révolution puis ensuite totalement déserté. Il est probable qu'il servit alors de carrière de pierres, d'où l'état de son délabrement actuel.
  Après 1890, le dernier habitant des ruines était un mendiant surnommé Napoléon logé par le maire de la commune dans le pigeonnier. Il faisait visiter les vestiges aux curieux.



  Ce Un autre pigeonnier, voir notre page « le colombier de Lanhalla » est visitable dans le Pays d'Iroise. sur la commune de Plouarzel pigeonnier est toujours visible depuis la petite route longeant le mur nord-est du domaine. On ne peut pas le visiter.



   L'association «SOS Château de Trémazan» s'est donné pour tâche de sortir de l'oubli cet ensemble fortifié qui fut l'un des plus puissants de Bretagne. C'est grâce à son action que les ruines sont très provisoirement préservées d'un écroulement général par des structures et des panneaux de bois.



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Merci pour son aide à Jean-François LE MENEC, Président de «SOS Château de Trémazan», et pour les documents qu'il a aimablement fournis.


Yannick Loukianoff


EN SAVOIR PLUS

    L'association «SOS Château de Trémazan» a édité deux ouvrages que l'on peut se procurer à la Maison des Chanoines, Kersaint, 29840 Landunvez.

SOS Château de Trémazan 2001 SOS Château de Trémazan 2006


   Le premier, destiné aux jeunes et au grand public, est abondamment illustré. Il traite d'abord de la légende qui entoure le château et place ensuite la forteresse dans son époque. Histoire et architecture se mêlent tout au long de l'ouvrage. Ce livre très documenté a servi de source principale à l'élaboration de cette page.
    Le second, destiné à un public plus averti, contient les actes d'un colloque pluridisciplinaire de trois journées qui s'est tenu à Brest en juin 2004 sur le thème du château de Trémazan. Archéologues, généalogistes, spécialistes d'héraldique, de dendrochronologie ou de pétrographie y côtoyaient les historiens, les peintres et les dessinateurs. L'ouvrage contient le texte intégral de leurs communications.




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