Cette plante exotique qui menace notre patrimoine végétal n'attire pas particulièrement l'attention du promeneur. On la trouve parfois dans les talus et les remblais du bord des routes ou des voies de chemin de fer, mais le plus souvent en bordure des cours d'eau. Elle adore en effet les terrains un peu humides, et aussi les décombres où elle a été involontairement apportée et où elle affectionne les restes de déchets métalliques.
St-Renan : Rond-point de Pont L'Hôpital
Porspoder, chemin de Kernioual
La renouée du Japon, qui pousse là-bas sur les pentes de volcans, a été introduite en Europe au XIXe siècle comme plante ornementale en raison de la beauté de son feuillage. On admire en effet ses grandes feuilles bien ovales à bout pointu dont la base est tronquée, ainsi que ses tiges rougeâtres dont les nœuds en relief, un peu comme ceux du bambou, lui ont donné son nom.
Pointe St-Mathieu, route touristique
Ploumoguer, route de Plougonvelin
Un développement spectaculaire
Mais l'on admire aussi la vitesse avec laquelle elle grandit. Au printemps, les tiges peuvent s'accroître de 4 à 5 cm par jour et atteindre une hauteur de plus de 4 m ! La renouée fleurit tardivement, en automne seulement, et offre alors aux insectes, dont les abeilles, un délicieux nectar que ceux-ci vont rechercher au fond de ses petites grappes de fleurs blanches.
Photo Pascal Lacroix © CBN de Brest
L'admiration des premiers temps se transforme vite en cauchemar pour le propriétaire du terrain lorsqu'il constate que la plante devient très envahissante. Ce ne sont pas ses graines qui sont à craindre : elles sont le plus souvent stériles. Mais la renouée du Japon, comme toutes les plantes de son genre, développe sous la terre un réseau de rhizomes1 monstrueux qui s'étendent dans toutes les directions, bourgeonnent, et donnent naissance à une quantité de nouvelles plantes.
Porspoder. Chemin de la chapelle St-Ourzal, août 2017. Hauteur de la plante : 5 m
Ces sortes de grosses racines, très profondes, ont en outre la faculté de répandre une toxine fatale pour les végétaux concurrents. Sous la terre, c'est la guerre chimique !
Dans ces conditions, le propriétaire se trouve vite dans l'obligation de devoir contrôler ce développement exponentiel qui menace non seulement ses propres plantations, mais aussi celles du voisinage. Au bord des cours d'eau, les sentiers d'accès sont vite envahis et obstrués au grand dam des pêcheurs et des randonneurs.
Lutter contre la renouée
Cette belle plante est une véritable peste : on la coupe, on la fauche au ras du sol, elle s'empresse de repousser et continue à se développer. Les herbicides n'atteignent pas son réseau de rhizomes profond parfois de plus d'un mètre. Ils sont en outre, on le sait, nuisibles aux autres plantes et à l'environnement. Les fragments coupés de sa végétation aérienne comme de ses rhizomes, même broyés, ont le pouvoir de donner naissance à de nouvelles plantules. Et l'extraction des rhizomes est, de plus, particulièrement pénible. Le plus souvent, devant tant de difficultés, on baisse les bras et la plante continue son invasion. La meilleure des attitudes est d'éviter de la propager : on ne la cueille pas, on ne la plante pas, bien sûr, mais on n'emploie surtout pas de tondeuse ou de débroussailleuse susceptible au contraire de favoriser sa dispersion : un seul copeau de 5 g peut donner naissance à une nouvelle plante ! On peut tenter d'épuiser les rhizomes en coupant tous les rameaux au ras du sol, plusieurs fois dans l'année, jusqu'à ce qu'ils ne repoussent plus. Mais il faut éviter de mettre les déchets de coupe dans le compost ou à la déchetterie. Ils doivent absolument être incinérés.
Reste aussi l'action préventive : planter des saules, par exemple, là où la renouée n'est pas encore arrivée et pailler le terrain pour contenir l'apparition de nouvelles pousses.
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Un rhizome est une tige souterraine de la plante, gorgée de réserves et ponctuée de nœuds capables de développer des bourgeons et des racines qui donneront naissance à de nouvelles plantes.
A ne pas confondre avec une racine, qui est un prolongement souterrain de la tige, sans feuilles ni bourgeons, et qui a pour mission de fixer la plante au sol et d'y pomper l'eau et les sels minéraux destinés à l'alimentation du végétal grâce à la photosynthèse exercée plus haut par les feuilles.
EN SAVOIR PLUS
Serge MULLER : "Plantes invasives en France"
Ed. Museum d'Histoire Naturelle 2006