Retour à l'accueilAnglais    Allemand    Espagnol    



Les derniers menhirs de Kermorvan


Commune du Conquet





GPS du parking de l'isthme :   48°21'50 N  4°46'31W






La presqu'île de Kermorvan

La pointe de Kermorvan, au Conquet, était à l'époque néolithique une colline aux flancs abrupts surplombant sans doute prairies et marécages. Sa configuration avec deux parties resserrées, aujourd'hui des isthmes, en faisait un site particulièrement facile à occuper et à défendre. Avec la montée du niveau de la mer, la valeur de cette positon stratégique s'est encore accrue et il ne faut pas s'étonner si de nombreux vestiges préhistoriques, mégalithes et tombes de l'âge du bronze, voisinent avec des restes de fortifications militaires de toutes les époques, jusqu'aux blockhaus de la Seconde Guerre mondiale, ayant considérablement bouleversé le paysage.

Accès :   Venant de Brest ou du Conquet, prendre la route entre l'arrière-port du Conquet et l'étang de Kerjan, direction St-Renan, Plouarzel. Obliquer à gauche au premier carrefour en direction de Ploumoguer-Plouarzel. Au carrefour suivant, prendre à gauche vers la presqu'île de Kermorvan et la plage des Blancs Sablons.
   Venant de St-Renan par la D67, tourner à droite au carrefour juste après le restaurant « Le Charldann ». Au carrefour suivant, tourner à gauche vers la plage des Blancs Sablons.
   Venant de Ploumoguer par la D28, tourner à droite vers la plage des Blancs Sablons à un carrefour situé dans un large virage. Parking dans l'isthme situé au bout de la route.



  Aujourd'hui, pour les estivants ainsi que pour les Brestois du week-end, la pointe de Kermorvan est le rendez-vous incontournable des baigneurs, des randonneurs, des amateurs de planche à voile ou de parapente. Une longue plage et une presqu'île encore sauvage y attirent de nombreux touristes.
  Cette petite péninsule qui sépare le port du Conquet de l'anse des Blancs Sablons a vu les peuples du néolithique y ériger des dizaines de mégalithes dont plusieurs dolmens. L'un d'eux, dont certains piliers sont ornés de cupules et de gravures, a même fait l'objet de moulages qui sont conservés au Musée de Préhistoire de Penmarc'h.   Le musée de Penmarc'h



Dessin de Jean-Yves André ©

  Malheureusement il n'en reste plus grand chose aujourd'hui, l'agriculture ainsi que la défense militaire de la côte prévalant de tous temps sur la conservation d'un patrimoine considéré comme obsolète. Toutefois, il faut signaler qu'en pleine guerre, en 1916, le capitaine G. du Plessix, lors du creusement de fortifications, a découvert dans les landes proches de l'actuel terrain de camping une grande dalle gravée d'un poignard sortant de sa gaine. Il a signalé cette découverte au commandant Alfred Devoir, qui était archéologue. Celui-ci a acheté la pierre au propriétaire du terrain et l'a offerte au Musée de Préhistoire de Penmarc'h où la dalle gravée est toujours exposée. 1


Carte établie par l'archéologue Alfred Devoir en 1909
On remarquera le nombre important de mégalithes encore recensés.
Seuls les n°1, 2, 10, 11, 15 et 16, toujours visibles aujourd'hui, sont décrits ci-dessous.


   Le promeneur ne peut découvrir aujourd'hui que six mégalithes : deux menhirs dans la lande au lieu-dit Maison Blanche, à l'Est du parking, puis deux autres de petite taille le long du sentier côtier longeant le port, et enfin les deux pierres rescapées d'un cromlech situées de part et d'autre de la petite route goudronnée réservée aux piétons après la barrière.



LES MENHIRS DE MAISON BLANCHE

-1- Le menhir OUEST

Accès: A partir du parking de l'isthme, revenir à pied sur la route goudronnée et prendre à gauche, face à un passage pour piétons, un sentier se dirigeant vers la mer et dont l'entrée est encadrée par deux grosses roches. A quelques mètres on aperçoit à droite dans les fougères un petit menhir.

  Cette pierre, très discrète, est facilement recouverte par la végétation. Sa hauteur n'est que de 1,10 m tandis que sa largeur atteint 1,25 m pour une épaisseur de 0,65 m. Elle n'a pas été taillée et est constituée de granodiorite issue de la Pointe des Renards.


Le menhir Ouest de Maison Blanche, ci-dessus vu par la tranche
et ci-dessous montrant sa face Sud.




-2- Le menhir EST



Accès : Continuer le sentier qui débouche sur le GR34 longeant l'Anse des Blancs Sablons. Tourner à droite en direction de la plage. A une cinquantaine de mètres, une brèche à droite dans le talus permet d'apercevoir au sud le sommet assez éloigné du second menhir parmi les fougères. A partir du GR34, l'accès est difficile en hiver lorsque la végétation fanée est pourtant couchée par le vent et la pluie. Il n'est pas du tout recommandé de tenter d'y parvenir en une autre saison : ronces, très hautes fougères et présence possible de vipères.

GPS : 48°21'53 N   4°46'07 W



  C'est une pierre de 1,83 m de hauteur pour une largeur de 1,70 m et une épaisseur de 1,10 m à la base. Pas un géant, donc, mais un gros menhir qui possède le rare talent, pour un tel monument, de savoir se travestir en peu d'années pour passer complètement inaperçu dans le paysage. Vous devineriez un mégalithe, vous, sous cette coiffure de lierre perdue au milieu d'un inextricable enchevêtrement de fougères et de ronces ?


Le menhir EST de Maison Blanche, face sud, en automne 2014


Le menhir EST de Maison Blanche, face nord

   Après le passage du coiffeur, la pierre est un peu plus présentable. Emergeant d'un épais lit de fougères, elle a fait partie d'un groupe de trois menhirs éloignés les uns des autres de quelques dizaines de mètres, décrit du temps où aucune construction n'existait encore sur le tevenn, la dune. Constituée de granodiorite de la Pointe des Renards, au Conquet, elle n'a pas du tout été taillée.



Un troisième menhir ?

   Dans une publication de 1903, P. du Chatellier signalait un troisième menhir de 0,90m de hauteur, situé à une soixantaine de mètres à l'ouest du premier, et pratiquement aligné avec les deux autres. Cette pierre, non retrouvée depuis, n'est pas signalée par Alfred Devoir en 1909. Elle a donc disparu entre ces deux dates.


LES DEUX PETITS MENHIRS DU PORT



Accès :   A partir du parking de l'isthme, franchir à pied la barrière et monter le sentier non goudronné qui longe le port. Après cette côte, une série d'importants affleurements rocheux parsème le chemin. Dès qu'ils cessent, on aperçoit à gauche du chemin une profonde dépression et à droite un petit passage dans les ronces et les fougères en direction d'un arbre isolé. Le premier petit menhir est là, à quelques mètres du chemin, dissimulé dans les fougères.

-1- Le menhir Est :

GPS : 48°21'47.5 N   4°46'43 W



  Ce premier menhir ne dépasse pas 1 m hors sol pour une largeur égale et une épaisseur de 0,30 m. Comme le terrain est en pente et la couche de fougères épaisse, il est probable que sa partie enterrée soit plus importante.




Dessin de Jean-Yves André ©

-2- Le menhir OUEST

GPS : 48°21'47.4 N   4°46'43.2 W



  Le second menhir, distant de seulement 6 m, est situé légèrement plus haut et à l'Ouest sur la pente. Sa forme est triangulaire, sa hauteur atteint 1,10 m et sa largeur à la base 1,45 m pour une épaisseur de 0,30 m.




Dessin de Jean-Yves André ©
Il est fréquent que les menhirs aillent par paire.
Ces deux sentinelles stoïques surveillent ainsi le port du Conquet
depuis des millénaires.


LES RESCAPES DU CROMLECH

Classés Monuments historiques le 22 octobre 1913




Accès :   Il faut remonter la petite route goudronnée, à l'ouest de la barrière, menant au phare de Kermorvan. Les deux mégalithes se trouvent à 200 m à peine.

GPS : 48°21'50 N   4°46'52.9 W



Le menhir n°1 du cromlech

  Le premier, photo et dessin ci-dessous, en gneiss, se trouve un peu en retrait sur la gauche de la route. On peut y accéder assez facilement à partir de la première entrée de champ à gauche après la pierre. Emergeant des broussailles, il mesure 2,5 m de hauteur et sa base fait 1,70 x 0,57 m. C'est la plus grosse pierre - donc la moins facile à enlever - d'un cercle de menhirs qui en comportait au moins treize.


Le menhir n°1 du cromlech


Le menhir n°1 du cromlech
Dessin de Jean-Yves André ©



Le menhir n°2 du cromlech

GPS : 48°21'50.4 N   4°46'55.6 W



  Ce second menhir, plus petit mais trapu, ( photo et dessin ci-dessous ) se trouve quelques pas plus loin à la limite d'une parcelle cultivée au Nord-Ouest de la route. Constitué d'une granodiorite gneissique, il mesure 1,78 m, en hauteur comme en largeur, pour 0,82 m d'épaisseur à la base.


Le menhir n°2 du cromlech


Le menhir n°2 du cromlech.
Dessin de Jean-Yves André ©


  Pendant plusieurs années, au début du XXe siècle, ce menhir fut incorporé dans une petite construction dépendant d'une ferme voisine disparue, une sorte de grange ou d'abri à animaux d'élevage, en pierres sèches, dont le mégalithe constituait une partie du pignon.


Le menhir n°2 du cromlech en 1909. Photo Alfred Devoir

  En fait ces deux menhirs de Kermorvan faisaient partie d'un cromlech en forme d'ellipse qui comportait, selon les auteurs, 12 ou 13 mégalithes.



  Une reconstitution très libre de ce cromlech a été fabriquée en 2005 pour le tournage du téléfilm « Dolmen » sur la presqu'île de Kermorvan. Ce décor a été démonté par la suite.



  Le capitaine Christophe-Paulin de la Poix, Chevalier de Fréminville, écrit en 1832, dans " Antiquités du Finistère " :

...« j'arrivai au sanctuaire ou Cromlec'h composé de douze pierres plantées debout en terre de manière à former une enceinte elliptique longue de cent quatre-vingt-cinq pieds sur cent vingt pieds dans sa plus grande largeur. La plus haute des pierres de ce Cromlec'h est celle de l'extrémité orientale : elle a huit pieds d'élévation. Vis-à-vis du côté de l'occident et diamétralement à l'opposite est une pierre haute de six pieds; toutes les autres sont de dimensions inférieures. »

Le pied correspondant en France à 0,324 m, les dimensions de cette ellipse étaient d'environ 60 x 39 m.

On entend souvent dire, au Conquet, que le cromlech fut détruit par les Allemands au cours de la Seconde Guerre mondiale pour faire passer des canons destinés à la défense de la Pointe de Kermorvan. Il y a évidemment une confusion puisque l'auteur de la citation ci-dessus ajoute :

...« Tels sont les monuments druidiques de la presqu'île de Kermorvan, ou plutôt, tels ils étaient, car j'ai appris avec peine qu'ils avaient été depuis peu entièrement détruits, et leurs pierres déplantées, brisées et taillées pour être employées à des constructions modernes.»

Son ouvrage ayant été publié en 1834, la destruction du cromlech se situe donc entre 1832 et 1834 et ce sont nos propres troupes, à l'époque, qui ont dégagé un terrain de manœuvres militaires. La confusion vient du fait que les troupes allemandes ont détruit d'autres mégalithes sur la presqu'île.


DES MEGALITHES DISPARUS


Le menhir n°12 de la carte d'Alfred Devoir établie en 1909 a complètement disparu.
Il devait se trouver non loin de la ferme, au sud du cromlech.


Ce menhir était séparé du cromlech par deux grands dolmens ( n°13 et n°14 sur la carte Devoir ) classés depuis le 22 octobre 1913.




On imagine combien ces monuments, cromlech, dolmens et menhirs ont pu constituer un haut lieu préhistorique. Tout cet ensemble n'existe plus.

Les cartes postales du Conquet nous montrent encore d'autres structures aujourd'hui disparues.









Conservés intacts par toutes les générations pendant une cinquantaine de siècles - ce n'est pas rien - ces mégalithes de Kermorvan n'ont pas résisté à l'inconscience humaine depuis 150 ans...

***

-1-G.du Plessix :
« Découverte d'une pierre gravée dans les landes de Kermorvan »
Bulletin de la Société Archéologique de Nantes, 1918, tome 58, p.3 à 11.



« Menhir » du Tévenn de Kermorvan, classé monument historique,
actuellement exposé à l'intérieur du Musée de Préhistoire de Penmarc'h.
La gravure en relief représenterait un poignard sortant de sa gaine.
La pierre, découverte en position couchée, pourrait être un menhir du néolithique moyen,
réemployé plus tard en dalle de sépulture.


Yannick Loukianoff


***

QR code de cette page


Télécharger ce flashcode